Le mois du rosaire : 2 octobre
Source : Livre "Le mois d'octobre consacré à N.D. du Rosaire ou manuel du chapelet & du rosaire à l'usage des fidèles"
2ème jour
Du Chapelet.
Si la fausse sagesse du monde affecte quelquefois du mépris
pour les pratiques consacrées par la religion ou ennoblies par
l'exemple des Saints, c'est qu'elle dédaigne souvent de s'instruire, et
qu'elle blasphème ce qu'elle ignore.
Éclairons les ténèbres dans lesquelles elle se plait et dévoilons d'abord à ses yeux l'origine de cette dévotion.
C'était la coutume des anciens peuples dans les pays orientaux, d'offrir des couronnes de roses
aux personnes distinguées par leur mérite ou par leur dignité : on ne
croyait pas pouvoir les honorer mieux que par cetle sorte de présent, et
les chrétiens se plaisaient à honorer ainsi la sainte Vierge et les
Saints.
Un grand pontife, un illustre docteur, celui des saints Pères que l'on a surnommé le théologien par excellence, à cause de la pureté de sa doctrine, S. Grégoire de Nazianze, dans le transport
de son amour si tendre pour la sainte Vierge, fut inspiré de substituer
à la couronne matérielle de roses, une couronne spirituelle de prières,
persuadé qu'elle serait plus agréable à la Mère de Dieu.
Il
composa à cet effet une suite ou couronne de prières, tissue des plus
belles louanges, des plus glorieux titres et des plus excellentes
prérogatives de Marie : c'était à peu près comme les prières
appelées litanies.
Cette invention ingénieuse du quatrième
siècle avait son prix et son mérite pour les personnes instruites qui
pouvaient se rendre cette sorte de prières familière ; mais cette
heureuse idée avait besoin, pour être à la portée de tous et pour
devenir populaire, d'être composée des prières les plus ordinaires de
l'Église, c'est-à-dire, de l'Oraison dominicale, de la Salutation
angélique et de la profession de foi du chrétien.
C'est l'idée que réalisa, dans le cinquième siècle, Sainte Brigide patronne de l'Irlande, qu'il ne faut pas confondre, comme on le fait souvent, avec S" Brigitte, veuve, princesse de Suède, morte à Rome en 1373.
Pour
faciliter cette dévotion nouvelle, il fallait fixer un certain ordre
dans ces prières, et trouver un moyen de les distribuer sans confusion,
et de les distinguer sans méprise.
Pour
éviter donc un certain travail de mémoire et ne pas distraire de
l'attention de la prière même, Sainte Brigide adopta l'usage des
anachorètes ou solitaires de l'Orient, qui, dans ces premiers siècles,
se servaient de petits globules de pierre ou de bois, pour mieux
compter le nombre de leurs prières ; et
elle pensa qu'il fallait enfiler ces grains en forme de couronne, et en
avoir de différentes grosseurs pour distinguer chaque prière différente.
Elle
introduisit d'abord dans la Communauté qu'elle avait établie sous la
règle de St. Benoit, cet usage qui se répandit ensuite partout.
Sainte Gertrude, Vierge, abbesse de Nivelle dans le Brabant, et qui vivait dans le septième siècle, se servait de cette sorte de chapelet, comme on le voit
dans sa vie ; un concile tenu en Angleterre en 810, fait aussi mention
de lu même dévotion, comme d'une pratique en usage alors depuis
longtemps ; et le fameux Pierre l'ermite, le promoteur de la 1ère croisade, dans le onzième siècle, fit adopter aux croisés cette manière de prier à l'aide du chapelet pendu à leur ceinture.
Il est résulté de tous ces faits que l'on a attribué l'origine du chapelet,
tantôt aux premiers anachorètes, tantôt à sainte Gertrude ou à Pierre
l'ermite ; tandis que cette heureuse idée de saint Grégoire de Nazianze a
été perfectionnée et promulguée par sainte Brigide, vierge d'Irlande ,
vers l'an 499, et non par sainte Brigitte de Suède, qui ne naquit qu'en
1302.
Nous avons vu que le chapelet
ou couronne tire son origine des couronnes de roses que l'on déposait
sur les autels, en l'honneur de Marie ou des Saints ; mais cette sorte
de couronne de roses, que l'on appelle en latin et en italien corona, se
nommait dans la basse latinité, capellina ; en vieux français, chapel
de roses ; d'où est dérivé le diminutif chapelet ou petit chapel, petite couronne.
L'usage du chapelet est une excellente pratique, pourvu qu'on ait soin en le récitant,
de joindre l'esprit à la lettre et d'en écarter toute sorte de
superstition, comme d'attribuer l'efficacité de la prière à ce nombre
déterminé de Pater et d'Ave plutôt qu'à un autre nombre.
Mais,
si en récitant un certain nombre de Pater et d'Ave, on n'a d'autre
intention que de se conformer au nombre fixé par l'Église pour gagner
les indulgences qu'elle y a attachées, on ne fait assurément rien de ridicule ni de superstitieux, et c'est même une pratique louable et excellente.
En
effet, l'excellence d'une dévotion se tire de la fin que l'on se
propose, des moyens que l'on emploie et des avantages qui en résultent ;
or, le chapelet a pour fin principale
d'honorer Jésus et Marie ; les moyens qu'il fait employer sont : la
prière, la méditation et l'imitation des Saints qui ont pratiqué cette
dévotion ; les avantages qu'il procure sont : toutes les faveurs, les
grâces et les prérogatives qui sont attachées à sa récitation ; ainsi
l'on peut dire avec fondement que celui qui récite le chapelet assidûment, y apprend le secret
de bien prier, y trouve les moyens de bien vivre, et obtient par la
ferveur de ses dispositions, les grâces nécessaires pour bien mourir.
Quoi de plus excellent, de plus utile pour procurer la gloire de Dieu, l'honneur de Marie et le salut de notre âme ?
Du reste, l'excellence de la dévotion du chapelet étant la même que l'excellence de la dévotion du rosaire,
en traitant de cette dernière dévotion, des avantages qu'elle renferme
et des prodiges que Dieu a opérés en sa faveur, tout lecteur sera
convaincu qu'elle doit être chère aux fidèles et faire leurs délices par
les garanties, les ressources et les avantages qu'elle leur offre.
Est-il
nécessaire de dire un mot de l'objection faite par les contempteurs de
cette pratique, qui, dans leur orgueil dédaigneux, demandent pourquoi
tant de Pater, tant d'Ave, tant d'ennuyeuses répétitions ?
—
Eh! qu'est-ce que toutes les prières de l'Église aux yeux de Dieu,
sinon des milliers de paroles qui se rapportent à un même sentiment
d'amour ? Qu'on l'exprime en Pater, en Ave ou en d'autres prières,
n'est-ce pas le même hommage rendu au
Seigneur ? Ennuyeuses répétitions ! Et pour qui ennuyeuses ? Est-ce pour
Dieu et pour la sainte Vierge ? Vous blasphémez ! Est-ce que que Dieu
et la sainte Vierge peuvent s'ennuyer ? Est-ce d'ailleurs un ennui pour
un bon père, pour une bonne mère, d'entendre un enfant répéter mille
fois : Je vous aime ? de sentir mille fois l'étreinte de ses bras qui
les serrent ? Notre Dieu est-il un moins bon père, Marie une moins bonne
mère que ceux que nous avons sur la terre ? Sont-ils plus susceptibles
d'ennui ? Pour qui donc est cet ennui ? Pour certaines gens qui récitent
mal ces prières ; pour
ces hommes animaux qui ne goûtent pas les choses de Dieu. (S. Paul.)
Mais l'âme fidèle, l'âme dévote à Marie, se lasserait-elle jamais de lui
dire affectueusement : Je vous salue, Marie
; — Sainte Mère de Dieu, priez pour moi. Non, le vrai chrétien, le vrai disciple de Jésus-Christ, ne peut pas se lasser, s'ennuyer de répéter sans cesse : Notre Père, qui êtes dans les Cieux.
Résolution.
Prenons la résolution de réciter fréquemment le chapelet, tous les jours même à l'exemple de tant de fervents serviteurs et de ferventes servantes de Marie.
Quelles que soient nos occupations, nous pouvons trouver le temps de le réciter, soit en commun, soit en notre particulier, aux champs, en voyage, en travaillant, etc.; et, si nous le disons avec attention et dévotion, nous ne tarderons pas d'en recueillir les fruits les plus abondants.
Prière
Mère de Dieu, vous êtes aussi la nôtre et nous vous saluons mille fois ;
jetez sur nous des regards de complaisance et accordez-nous votre bénédiction lorsqu'en disant notre chapelet,
nous répétons affectueusement le salut ineffable que vous adressa l'envoyé du ciel, l'ange Gabriel, le jour de l'Annonciation.
L'assurance
où nous sommes que cette pratique de dévotion, cette prière vous est
agréable, nous remplit de la confiance la plus entière.
O Mère tendre et puissante ! daignez nous obtenir du Dieu de bonté les grâces qui nous sont nécessaires pour nous montrer en tout et partout de vrais enfants de Marie.
Ainsi soit-il.
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