Le mois de saint Joseph
31 mars
Source : Livre "Mois de Saint Joseph : composé de trois neuvaines et un triduum pour tous les jours du mois de mars" par Alexis Lefebvre
TRENTE ET UNIÈME JOUR
CLÔTURE
Allez à Joseph. (Gen. LXI,55.)
Nous voici donc arrivés au dernier jour de ce mois béni.
Un
double sentiment doit remplir noire cœur ; un sentiment de
reconnaissance d'abord pour tant de grâces que nous avons reçues par les
mains de saint Joseph, et un sentiment de confiance et d'amour envers
ce grand saint, que nous avons appris à mieux connaître.
Mais
enfin, quelle pensée, quels souvenirs voudrais-je laisser en ce moment
au cœur fidèle, et imprimer dans l'esprit de nos pieux lecteurs ?
I.
Je désire d'abord que cette parole : lté ad Joseph retentisse doucement
dans votre âme, et qu'elle soit pour vous la conséquence de ce que nous
avons médité, depuis le commencement de nos saints exercices.
Elle me semble en effet comme renfermer et résumer tout ce que nous avons étudié, pendant le cours de ce mois de grâces.
Pensez
que c'est Jésus-Christ lui-même qui, du haut des cieux, vous adresse
cette douce invitation, et qui vous dit : lte ad Joseph ! Allez à Joseph
!
Allez
! il a tout pouvoir pour vous sauver : je lui ai confié la suprême
intendance de mon empire ; il a sur mon cœur une puissance d'amour
infini, car je l'ai fait entrer dans la gloire de tous mes saints
mystères, et je lui ai donné des titres qui lui assurent dans le ciel un
crédit et une autorité incomparables. Je l'appelais mon père, quand il
était sur la terre, et je lui obéissais. Il peut encore maintenant
m'appeler son enfant, et je ne puis rien lui refuser.
— Allez ! et faites tout ce qu'il vous dira.
lte
ad Joseph ! Allez ; il possède le trésor de toutes les vertus ; vous
n'avez qu'à parler à son cœur, et lui dire ce qui vous manque et ce que
vous désirez... C'est lui qui vous donnera la lumière de la foi ; des
rayons d'espérance tomberont de ses mains sur vous, et la flamme d'amour
divin s'allumera dans vos âmes au feu de son regard paternel. Allez ;
il est humble, il est pur. C'est l'homme juste par excellence ; il vous
donnera la vertu qui vous est le plus nécessaire, en un mot, la grâce
que vous lui demanderez.
— Allez, mais faites ce qu'il vous dira.
lté
ad Joseph ! Allez, qui que vous soyez, enfants ou vieillards, riches ou
pauvres, justes ou pécheurs, et vous-mêmes, anges de la terre, prêtres
et pontifes, allez à Joseph !... il sera votre protecteur, il vous
défendra contre tous vos ennemis ; il sera votre lumière, votre force,
votre consolation et votre espérance, à la vie, à la mort ; il sera
votre père !
— Allez à Joseph ! lté ad Joseph ! et faites ce qu'il vous dira.
Tout
le monde en effet sait que l'Eglise, les Pères, et les plus grands
Docteurs, nos maîtres dans la foi, ont toujours appliqué ces paroles à
saint Joseph, notre glorieux patron.
Le fils de Jacob, l'illustre patriarche Joseph, le grand ministre du
roi Pharaon, n'était que la figure de cet homme incomparable, prédestiné
à la gloire d'être l'époux de la Vierge immaculée, et le père
nourricier de Jésus. Je ne crains pas d'assurer qu'un parallèle suivi
entre les deux Joseph pourrait fournir non-seulement le sujet d'un beau
discours, mais le fonds le plus riche pour tous les exercices d'un
second mois, consacré entièrement à la gloire de notre saint protecteur.
Mais il n'entre pas dans ma pensée, ni dans le plan de cet ouvrage, de finir par un éloge ou le panégyrique de ce grand saint.
Je
voudrais seulement, après avoir exprimé, en quelques mots et de la
manière la plus simple, ce que je crois et ce que je sens sur le
caractère même de ses perfections merveilleuses, laisser dans les cœurs
une dernière réflexion pratique.
II.
J'ai donc réservé pour ce moment une pensée qui m'a frappé bien des
fois, et qui, je puis le dire, n'a pas cessé un instant d'être présente à
mon âme, depuis le commencement du mois.
Cette pensée renferme tout, à mon sens ; elle peut suffire pour nous
faire comprendre la sainteté et la puissance de Joseph, et pour inspirer
une confiance sans bornes à ses fidèles serviteurs et à ses enfants.
Méditez-la, et vous allez comprendre aussi.
N'est-il
pas vrai que Joseph vous a toujours paru bien à sa place dans le
tableau de la Sainte Famille, auprès de Marie et de Jésus enfant ? Il y
est non-seulement bien et dans de justes et belles proportions ; mais il
y est nécessaire, et sans lui il manquerait quelque chose à cette douce
image. Sans doute il est un peu dans l'ombre ; on dirait qu'il veut se
cacher, il s'efface toujours et dans tous les mystères, à Bethléera
comme à Nazareth, ou en Égypte ; mais il est là ; on ne peut sans lui
concevoir ou représenter aucune scène de la divine enfance de Jésus.
Eh
bien, je vous dis qu'il en est de même dans la gloire des cieux. Il se
trouve encore avec Jésus et Marie, auprès de Jésus et de Marie ; et il y
est toujours dans de justes proportions. Son trône n'aura pas le même
éclat, mais il n'est pas loin, et rien n'a pu les séparer pour
l'éternité. Heureux ceux à qui les anges auront fait connaître ces
mystères !... ils auront une confiance sans bornes, et ils obtiendront
toutce qu'ils demanderont à Jésus, au nom de son père nourricier.
Mais
que cela est rare ! Il y a une foule de personnes, même parmi les
chrétiens, qui remarquent à peine saint Joseph, dans ce tableau céleste
de la Sainte Famille.
Leurs
regards s'arrêtent toujours au premier plan, c'est-à-dire sur Jésus et
sur sa glorieuse Mère ; c'est à peine s'ils aperçoivent dans le fond
cette noble et belle figure de saint Joseph ! Mais qu'il vienne un
connaisseur, un véritable artiste, et, après avoir contemplé avec
ravissement la Mère et l'Enfant, il ne pourra s'empêcher d'admirer
encore ce beau vieillard. Quelle tête ! se dirat-il avec transport, quel
front ! quel œil ! et quelles mains ! quelle pureté dans ces lignes !
quelle harmonie dans tous les traits de ce groupe merveilleux !...
C'est
ainsi, vous dis-je, que les plus grands saints et que les âmes les plus
intérieures ont de tout temps reconnu et exalté la gloire de Joseph,
ses vertus et ses bienfaits. L'esprit de Dieu leur a appris à ne jamais
séparer dans leurs prières les trois noms de Jésus, Marie, Joseph. Allez
donc à Joseph ! allez avec confiance : lté ad Joseph !
III.
Mais hâtons-nous de venir à la parole pratique de ce dernier jour, et
apprenons de saint Joseph trois secrets importants, et qui seuls
suffiraient pour nous conduire à la plus haute perfection ; je veux dire
prier, travailler, souffrir.
— Allez à Joseph ! et, si vous faites ce qu'il vous dira, vous aurez bientôt appris cette grande leçon de la sainteté.
1° Prier.
— Nous savons que c'est la condition même de la grâce divine et de la vie de Dieu en nous.
Sans
la prière, nous n'avons rien à attendre du ciel, et sans le secours du
ciel, environnés de tant d'ennemis cruels et perfides, comment
pourrions-nous éviter la mort ?
La
prière est d'ailleurs la fin de la création. Tout prie dans les cieux
et sur la terre ; tout prie, de reconnaissance et d'amour, de douleur,
d'espérance ou de crainte.
Il
serait bien coupable l'homme qui refuserait à Dieu cet hommage de son
cœur! il serait bien insensé celui qui ne lui demanderait pas le secours
de sa grâce ! il serait bien ingrat celui qui ne le remercierait pas de
ses bienfaits !
Or
la vie de saint Joseph a été une prière continuelle. Comme les anges du
ciel, qui voient la face de Dieu, ne cessent de l'adorer et de l'aimer,
ainsi Joseph, près de Jésus, ne pouvait détourner un instant son esprit
et son cœur de la plus sublime et de la plus douce contemplation.
Mais
non-seulement Joseph priait Dieu ; il priait avec Dieu. Rien de plus
touchant que cette pensée de la prière en famille à Nazareth.
C'était quelquefois Joseph, et plus souvent encore Marie, qui invitait l'Enfant Jésus à faire la prière du soir ou du matin.
Oh
! pour apprendre à bien prier, il vous suffira de contempler en silence
cette image de la prière à Nazareth !... elle ravira votre cœur. Voyez
Jésus, considérez sa sainte mère, contemplez saint Joseph, entrez dans
leurs cœurs. Il est impossible de n'être pas louché de la grâce. Jamais
vous ne pourrez comprendre l'humilité de Joseph, la ferveur toujours
croissante de sa prière, et l'union intime de ce saint patriarche avec
le Cœur de l'Enfant-Dieu. Vous prierez avec lui et comme lui. lte ad
Joseph.
2° Saint Joseph vous apprendra encore un secret plus précieux : à travailler.
—
Remarquez bien ceci : la prière est déjà un acte saint et religieux ;
mais le travail est plus parfait encore ; car travailler, c'est prier et
agir tout ensemble, d'après cette parole célèbre de saint Augustin :
Qui laborat, orat. Le travail est d'ailleurs un sacrifice d'expiation
pour l'homme coupable ; c'est la première, la seule pénitence imposée
par le Seigneur à nos premiers parents ; et, pour le chrétien, c'est
l'arme la plus puissante qui le fera triompher de tous les ennemis de
son salut.
Mais
vous comprenez que, pour avoir ce double mérite et nous procurer tous
ces avantages, il faut absolument que le travail soit sanctifié,
c'est-à-dire que vous devez travailler pour Dieu et en union avec
Jésus-Christ.
Or
saint Joseph sera encore ici notre maître et notre modèle, Il était
charpentier, et toute sa vie, ce pauvre artisan a travaillé de son état ;
c'est à la sueur de son front qu'il gagnait le pain de chaque jour. Si
ce fut pour lui une nécessité, ce fut aussi une grande vertu.
Vous
méditerez sur la sainteté, la perfection de cet homme juste, qui seul a
eu le bonheur de travailler toujours avec Jésus, et pour Jésus.
Avec
Jésus, c'est-à-dire en présence de ce Dieu, mais en sa présence réelle,
toujours auprès de lui, puisqu'il était son patron à Nazareth : avec
Jésus, c'est-à-dire en union avec lui, mais en union véritable et sans
jamais se séparer, puisque ce Dieu était son apprenti ; ils
travaillaient donc toujours ensemble.
— Et pour Jésus, mais directement, personnellement, uniquement pour lui et pour sa mère ; pour les nourrir enfin !...
Or,
quoique jamais vous ne puissiez aspirer à ce qu'il y a de plus
merveilleux et d'absolument exceptionnel dans cette vie céleste de
Nazareth, vous apprendrez au moins de saint Joseph à sanctifier et
diviniser votre travail. Vous l'imiterez autant que vous pourrez, par la
pureté d'intention, qui vous fera travailler aussi avec Jésus et pour
Jésus. lté ad Joseph... En voyant Jésus-Christ même votre Dieu se faire
ouvrier, apprenti, et travailler pendant trente ans avec Joseph et sous
ses ordres, vous comprendrez que le travail peut avoir un mérite infini,
et que saint Joseph est tout-puissant dans les cieux.
3° Mais souffrir, voilà le plus précieux de tous les secrets que saint Joseph doit nous apprendre.
—
C'est en effet la plus sublime de toutes nos études en religion, la
science la plus parfaite, et, disons-le aussi avec vérité, c'est la plus
difficile de toutes les leçons.
Prier,
c'est bien ; travailler, c'est mieux ; souffrir, c'est la perfection
même et la sainteté, c'est quelque chose de vraiment divin.
N'est-ce
pas en effet l'action de Dieu même en nous, mais l'action la plus
directe et la plus positive ; nous n'avons qu'à nous soumettre, nous
unir à Dieu et le laisser faire, pour coopérer à cette grâce.
Or
tous les hommes sans exception sont destinés à souffrir, beaucoup
souffrir, toujours souffrir. Cette terre est appelée la vallée des
larmes ; et c'est avec raison, car elle en est toute pleine.
Les amis de Dieu souvent paraissent destinés à des douleurs encore plus grandes que les autres.
Mais
aussi quels mérites, s'ils savent les offrir à Dieu en union avec
Jésus-Christ, et par amour pour lui ! Non-seulement alors ils ne se
plaindront pas, et ils ne se laisseront pas aller au murmure, mais ils
seront heureux, ils jouiront de la paix dans l'amertume ; ils iront
jusqu'à l'ivresse de la croix, jusqu'aux transports de l'amour, même
dans la mort.
Saint Joseph nous apprendra donc à souffrir.
Telle
a été en effet la destinée de cet homme juste, et de Marie sa glorieuse
épouse, et tel est le sort de tous ceux que le Seigneur aime.
Joseph
a beaucoup souffert, et bien que l'Eglise ne compte que sept douleurs
pour lui, comme pour la sainte Vierge, on peut dire qu'il a souffert
comme elle, pendant toute sa vie. Mais avec quelle soumission, quel
abandon, quel courage, quelle confiance et quel amour!
Vous
ferez encore ici la même réflexion ; il a souffert pour Dieu et avec
Dieu. Comme la sainte Vierge, mère de Jésus, il a partagé toutes ses
douleurs, ses inquiétudes, ses humiliations, l'exil et toutes les
privations de l'indigence. Contemplez ce saint modèle de paix dans les
épreuves et tâchez de l'imiter. lte ad Joseph.
Combien d'autres enseignements encore nous pourrions trouver dans la vie de ce grand saint !
Après avoir appris à prier, travailler et souffrir, il nous dirait
comment on peut aimer, et comment il faut mourir... et dans ces leçons,
il ne serait pas seulement un maître pour nous, et un exemple, mais un
puissant protecteur, un guide sûr et un appui.
—
Toutes ces considérations nous entraîneraient encore trop loin. Qu'il
nous suffise de répéter la parole du Seigneur : lté ad Joseph : Allez à
Joseph, et faites tout ce qu'il vous dira : lté ad Joseph ! et
qusecumque dixerit vobis, facite.
Recueillez-vous donc, et, vous prosternant aux pieds de son image, offrez-lui une sainte prière de reconnaissance et d'amour.
Consacrez-vous aujourd'hui et pour toujours à ce bon saint, et demandez-lui avec confiance la grâce que vous désirez le plus.
Déjà
bien des fois pendant ce mois, vous lui avez confié ce secret de votre
cœur ; mais voici le jour et l'heure d'une dernière et suprême
bénédiction... Il vous sera fait comme vous aurez espéré ; demandez
cette grâce, sans hésiter, pour vous ou pour l'Eglise entière ; allez à
Joseph, et il vous répondra du haut des cieux.
A cette intention vous pourrez simplement réciter le Souvenez-vous... ou les litanies de saint Joseph.
FIN DU MOIS DE SAINT JOSEPH.
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