Le mois de saint Joseph
24 mars
Source : Livre "Mois de Saint Joseph : composé de trois neuvaines et un triduum pour tous les jours du mois de mars" par Alexis Lefebvre
VINGT-QUATRIÈME JOUR
SAINT JOSEPH PROTECTEUR SPÉCIAL DES PAUVRES
PÉCHEURS
PÉCHEURS
Vous êtes tout mon secours, et mon sauveur. (Ps. LXIX, 6.)
Voilà
une belle prière ; mais est-ce un cri de détresse et d'espérance dans
la bouche du roi prophète ? ou bien plutôt ce texte ne serait-il pas un
transport de joie et de reconnaissance ?
Il nous semble que c'est à la fois l'un et l'autre sentiment exprimé avec bonheur.
—
Ayez pitié de moi, venez à mon secours, ô vous qui seul pouvez me
sauver, me défendre et me délivrer... Adjutor meus et liberator meus es
tu ! N'est-ce pas la prière, le cri naturel d'un cœur malheureux, qui
tremble à la vue du danger, mais qui n'a pas encore perdu tout espoir ?
—Ah
! soyez béni, mille fois béni, c'est vous qui m'avez sauvée ! vous qui
m'avez délivrée !... Adjutor meus et liberator meus es tu ....
s'écrierait aussi une âme arrachée à l'abîme de la mort.
Eh
bien, c'est avec ce double sentiment que nous mettrons aujourd'hui ces
paroles sur les lèvres d'un pauvre pécheur qui, en proie aux remords de
l'enfer, implore avec confiance la protection de saint Joseph, et qui
espère : adjutor meus !... et puis, au moment où touché de la grâce,
converti à Dieu, il vient d'obtenir son pardon, il dira aussi avec
transport cette belle prière au grand saint qui l'a sauvé et qui vient
de le délivrer de la mort : adjutor meus et liberator meusestu !...
C'est vous, ô Joseph, qui êtes toute mon espérance ! vous êtes mon
libérateur !
Voici
en deux mots le sujet de cet exercice : saint Joseph est le protecteur
des pauvres pécheurs. Qu'ils le prient ; qu'ils espèrent en lui ; il les
défendra, il les sauvera.
Cette proposition doit être méditée avec soin.
Les
raisons les plus graves, les exemples les plus frappants vont la
démontrer au lecteur attentif et pieux. C'est ce qu'on appelle
ordinairement la preuve de droit et la preuve de fait.
I. Preuve de droit, ou raison de cette protection spéciale de saint Joseph sur le pécheur.
Commençons
par dire une chose qui pourra paraître étrange, mais qui est très-vraie
et positive, c'est que saint Joseph, comme la sainte Vierge, doit aimer
singulièrement les pauvres pécheurs, puisque sans le péché, il n'était
pas nécessaire qu'il y eût de rédemption, et par conséquent, Marie
n'aurait pas été mère d'un Dieu, Joseph n'aurait pas été le père
nourricier de ce Dieu fait homme, ni le glorieux époux de la Vierge ; et
nous ne craignons pas de dire que, dans ce sens, le péché d'Adam et nos
propres péchés ont été pour lui des fautes heureuses, puisqu'ils lui
ont mérité en quelque sorte cette gloire : felix culpa!...
C'est
pour cela, dit saint Liguori, et plusieurs saints docteurs avec lui,
que la vierge Marie est le refuge et l'avocate des pécheurs ; et saint
Joseph, au même titre, sera leur défenseur et leur appui : adjutor et
protector eorum est.
Mais,
voici maintenant les deux raisons toutes particulières, pour lesquelles
Joseph doit les protéger : Ie le malheur et 2° le danger de ce triste
état.
1°
L'excès de ce malheur... Le péché donne la mort à une âme, en la
séparant de Dieu. Il lui fait perdre l'amitié de Dieu, et pour parler
encore plus juste et dans la vérité du dogme idéologique, le péché lui
fait perdre Dieu ! Et Dieu étant la vie de l'âme, elle tombe aussitôt
dans la mort ; c'est pour cela que nous disons un péché mortel ; avec
Dieu, elle perd la vie de la grâce et de l'amour ; elle est morte !
Perdre
Dieu ! malheur infini, dont la pensée seule doit faire frémir le cœur
de Joseph, et va le toucher de la plus profonde compassion pour nous...
Ah ! ne savez-vous pas, mon cher lecteur, que Joseph un jour a eu le
malheur de perdre Jésus ! non point par sa faute assurément, mais enfin
il l'avait perdu ; lorsque ce divin Enfant était resté à Jérusalem, et
que de retour à Nazareth, Joseph et Marie s'aperçurent qu'il n'était
plus avec eux, ni avec ceux qui les avaient accompagnés à la ville.
Quelle douleur, et quelles larmes !... Ils le cherchèrent avec anxiété,
et finirent par le retrouver au temple.
—
Joseph a donc senti cette peine d'être séparé de son Dieu, quelques
instants de l'avoir perdu ; et le souvenir de ce chagrin immense le
touche de pitié, quand il voit une âme condamnée, et comdamnée par sa
faute, à ce même malheur. Il priera pour elle, il demandera sa grâce ;
il conjurera Jésus de revenir à ce cœur.
Mais,
si le pauvre pécheur surtout commence lui-même à sentir la perte qu'il a
faite, si de son côté, gémissant sur ses fautes, il rappelle Dieu, s'il
le cherche avec douleur et regret, s'il le cherche comme Marie et
Joseph, avec Marie et Joseph, oh ! bientôt il le retrouvera : il est
impossible, dit Origène, que Jésus tarde longtemps à revenir :
quserenscum Joseph Mariaque, reperies, c'est-à-dire que les prières de
Marie et de Joseph toucheront le cœur de Dieu, et obtiendront le pardon
et la miséricorde à cette âme infidèle.
Joseph,
le saint patriarche Joseph, a été touché de voir ses frères malheureux
et repentants, lorsque, prosternés à ses pieds, ils demandaient grâce au
nom de leur vieux père Jacob et de leur jeune frère Benjamin ; à cette
vue, à cette humble prière, il n'a pu retenir ses larmes...
Ah ! Joseph notre protecteur puissant et notre père, pourrait-il rester
insensible, quand il verra un pécheur contrit et humilié, qui le
conjure d'obtenir son pardon !
Non,
il parlera au Cœur de Marie sa glorieuse épouse, il parlera au Cœur de
Jésus qui lui obéissait sur la terre, et il arrachera cette âme à la
mort, en lui rendant l'amour même de Dieu.
2°
Le danger de ce triste état de péché doit surtout exciter l'intérêt et
la pitié de saint Joseph. Ce danger est la menace imminente de la mort
seconde, c'est-à-dire de la mort éternelle, de l'éternelle damnation, ou
séparation de Dieu. Du haut des cieux, Joseph contemple ces victimes
infortunées de leurs passions, il les voit déchirées par le remords, et
sur le point d'être précipitées dans l'abîme ; pourrait-il ne pas être
touché de ce malheur, si surtout on l'invoquait avec confiance ? Si le
pauvre pécheur lui disait avec larmes, comme les frères de Joseph,
l'ancien patriarche : Salus nostra in manu tua est (Gen. Xlvu,
25) : Notre sort est entre vos mains, ayez pitié de nous !...
pourrait-il fermer l'oreille à cette prière ? n'obtiendrait-il pas
aussitôt de Jésus une sentence de miséricorde ?
Cette
interprétation des saintes Écritures est conforme à la pensée des
saints Docteurs, qui se plaisent à comparer le fils de Jacob, le premier
Joseph, au grand saint notre protecteur ; elle est conforme au
sentiment de l'Église qui, dans l'office du glorieux époux de Marie, ne
cesse de lui appliquer ces textes sacrés. Et je veux encore à ce propos
répéter la réflexion que je faisais au commencement de cette méditation :
... Joseph, notre bon saint Joseph, ne pourra jamais abandonner les
pécheurs, à qui il doit même la gloire de ses plus beaux titres et son
bonheur.
N'est-il
pas vrai que le patriarche Joseph n'aurait pas été placé sur les degrés
du trône d'Egypte, et préposé à tous les trésors de Pharaon, sans la faute de ses frères ?...
Cette
faute a été, sinon la cause, au moins l'occasion de son élévation et de
sa puissance ; et il n'a pu résistera leurs prières, ni retenir ses
larmes ; il leur a pardonne, il leur a rendu tout son amour.
Eh
bien, c'est ainsi que Joseph aura toujours pitié des pauvres pécheurs
qui auront recours à lui ; il leur doit son pouvoir dans le ciel et sur
le cœur même de Dieu. Il priera donc, et Dieu, qui ne peut rien lui
refuser, accordera la grâce, et fera tout ce que son père nourricier lui
dira de faire : ... quodeumque dixerit... faciet.
II. Nous n'avons plus qu'à prouver cette vérité par quelques exemples ; c'est la preuve de fait que
nous avons annoncée au commencement de l'exercice de ce jour. Mais ici,
quel est notre embarras, et, parmi tant de traits de la protection de
saint Joseph sur les pauvres pécheurs, lequel choisir ? Les livres sont
pleins de ces merveilles de la puissance et de la bonté de saint Joseph.
Le plus célèbre de ces ouvrages est sans contredit celui du P. Patrignani, de la Compagnie de Jésus. Ce pieux auteur n'a pas peu contribué à la gloire de saint Joseph et à l'extension de son culte.
Parmi
les prodiges qu'il raconte de la protection de saint Joseph , il est
remarquable que la plupart ont été opérés en faveur des pécheurs ; et
l'on peut partager en deux classes tous ceux qui ont été comblés de ces
grâces extraordinaires : Ou bien c'étaient des cœurs déjà repentants, et
qui avaient invoqué eux-mêmes ce grand Saint, pour obtenir leur
conversion ; ou bien c'étaient des hommes indifférents et encore
endurcis, qui ne pensaient pas à leur salut et qui résistaient à Dieu,
mais pour lesquels des âmes pieuses avaient prié saint Joseph avec
confiance.
Ce
saint Protecteur avait répondu à tous, au pécheur déjà touché de la
grâce, et lui envoyant une lumière de foi plus vive, un remords plus
pénétrant, qui le conduisait bientôt à la douleur sincère, et finissait
toujours par une vraie conversion et le bonheur d'un pardon divin.
—
0 pauvre pécheur, qui lisez ces lignes, commencez à prier, aujourd'hui
même, faites pour votre âme la neuvaine de saint Joseph, la grande
neuvaine des sept Pater et des sept Ave... et j'ose vous promettre
qu'elle ne se terminera pas, sans que vous ayez obtenu la grâce de votre
conversion, mais d'une conversion sincère et durable...
Au
lieu de prendre des exemples dans le livre de Patrignani, que tous
peuvent consulter, je me contenterai de citer un fait que je puis
attester, puisque j'ai connu moi-même celui qui a reçu cette faveur
extraordinaire.
C'était
un malheureux jeune homme, encore esclave des passions de son cœur,
mais cependant bien résolu de se sauver. Souvent il nous a raconté sa
conversion, et, bien qu'il soit mort aujourd'hui, nous ne pensons pas
pouvoir dire son nom dans ce livre.
D'après
le conseil d'un sage directeur, il fit donc pour lui-même la grande
neuvaine des sept Pater et des sept Ave ; le dernier jour, non-seulement
il sentit sa chaîne se briser, mais il comprit soudain et en même temps
que son âme, devenue libre, commençait à se détacher du monde.
De
fait, il y renonça quelques mois après, pour se consacrer au Seigneur,
et, devenu membre d'un ordre religieux, il a imité les vertus des saints
et mérité bientôt une belle couronne dans les cieux.
—
Tous les ans à l'époque de la fête de saint Joseph, il faisait de
nouveau sa grande neuvaine, tantôt pour la conversion d'un pécheur,
tantôt pour obtenir quelqu'autre grâce spirituelle et il nous a souvent
répété lui-même que jamais saint Joseph n'avait été sourd à cette
prière. Mais aussi quelle belle, quelle douce mort il a obtenue de son
saint Protecteur ! On assure que saint Joseph lui avait apparu, et lui
avait fait un signe pour l'appeler au ciel.
Et
maintenant, ajoutons un mot seulement sur les grâces obtenues en faveur
des pécheurs, qui n'ont pas invoqué eux-mêmes le bon saint Joseph, mais
pour lesquels on avait prié ce grand Saint.
Le
pieux auteur dont j'ai déjà cité le nom, raconte une foule de traits
admirables et bien propres à exciter notre confiance. Ce sont des mères
qui ont prié pour la conversion de leur fils et qui l'ont obtenue ; des
femmes vertueuses qui ont demandé le retour à Dieu d'un mari infidèle,
indifférent ou impie, et qui ont été exaucées. Ce sont des enfants qui
ont invoqué saint Joseph, pour obtenir à un père mourant la grâce de
revenir à Dieu et de recevoir le pardon, avant de tomber dans
l'éternité, et cette faveur leur était accordée, comme par miracle.
La
justice de Dieu faisait aussitôt place à la miséricorde : ces âmes
égarées revenaient à la foi, et retrouvaient de l'espérance et de
l'amour.
Je
puis affirmer encore ici que tous les ans, à l'époque de la neuvaine,
qui se fait dans notre église du Jésus, pour la fête du Patronage, nous
avons eu des preuves touchantes de la puissance de ce grand saint.
Il
me serait facile d'extraire du livre même des archives de notre pieuse
Association de la Bonne Mort, bien des témoignages de ces faveurs
extraordinaires.
Ces
lettres ont un cachet de vérité, qui ne laisse pas de place à un seul
doute ; nous les conservons précieusement comme un petit trésor de
famille qui appartient à nos associés, et dont un jour il nous sera
donné peut-être de les faire jouir.
Toutefois
ici, je me permettrai de citer seulement quelques lignes de ces
annales, par un sentiment de reconnaissance d'abord à notre saint
Protecteur, mais surtout pour donner de la confiance à ceux qui nous
liront.
Presque
toutes ces lettres commencent par des mots semblables à ceux que je
vais fidèlement transcrire : « La reconnaissance me fait un devoir de
vous dire que le bon saint Joseph a exaucé les deux demandes que je lui
avais faites pendant la neuvaine, etc.. »
Une
autre : « Je viens vous demander de vouloir bien porter à l'autel
toutes nos actions de grâces, car dès le premier jour de la neuvaine, le
bon saint Joseph nous a obtenu, etc... »
Une
autre : « Gloire et actions de grâces au bon saint Joseph !... un
pauvre pécheur pour lequel nous l'avons prié, est déjà touché de la
grâce, etc.. »
Une
autre : « Je vous prie d'avoir la bonté de rendre grâces à Dieu pour
une faveur presque miraculeuse, puisqu'on la regardait comme impossible,
etc.. »
Une
autre : « Mon premier mot sera, comme pourtant d'autres, un mol de
reconnaissance envers le bon saint Joseph. Pendant la neuvaine du
patronage je lui avais demandé, etc.. »
Une
autre : «... Je viens vous demander des prières d'actions de grâces à
saint Joseph : dès le premier jour de la neuvaine, etc..»
Une autre : « C'est avec bonheur que je viens vous apprendre la grâce obtenue par un de nos associés, etc.. »
Je
ne puis pourtant résister au plaisir d'en copier deux tout entières,
parce qu'elles sont plus courtes, et que, de plus, elles me semblent
avoir un caractère de simplicité et de naïveté telles, qu'il est
impossible de ne pas y reconnaître le langage de la vérité même.
«
Mon révérend Père, « J'ai l'honneur de vous annoncer que je suis
satisfait de vos paroles véridiques. J'ai effectivement reçu deux grâces
spirituelles du bon saint Joseph pendant la neuvaine ; ainsi que de
l'argent dont j'avais besoin, à partir du 15 avril... » N...
« Mon révérend Père,
«
Je veux acquitter un devoir de reconnaissance envers le bon saint
Joseph et vous remercier de la confiance que vous m'avez inspirée en
lui. Elle m'a fort bien réussi, je viens d'obtenir, contre toute
espérance, une grâce que j'ai sollicitée, pendant la neuvaine de
préparation à la fête du Patronage de ce bon saint. Ce n'est pas que je
lui ai fait beaucoup de prières, mais à différentes reprises, je me
contentais de dire : Bon saint Joseph, je compte tout à fait sur vous.
Et en effet, il m'a admirablement exaucée, j'en suis toute à la
reconnaissance, et je me suis fait un devoir de vous l'exprimer,
regrettant de ne pouvoir le faire plus chaleureusement encore. » N...
La plupart de ces prières avaient été adressées au Saint, pour obtenir la conversion de quelques pauvres pécheurs.
Une
foule d'ex-voto fixés à notre autel de saint Joseph, et dans ses plus
vénérés sanctuaires, attestent que les mêmes grâces ont été partout
obtenues par sa puissante intercession. Il reste donc prouvé qu'il est
le protecteur des pécheurs.
Invoquez-le
avec confiance, ô vous qui gémissez encore sous le poids du péché... Et
vous à qui déjà le ciel a pardonné, priez pour vos frères malheureux,
priez Jésus leur sauveur, Marie leur avocate et leur mère ; priez, priez
Joseph, leur ami et leur protecteur.
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