Le mois de novembre consacré
au souvenir des âmes du purgatoire
27 novembre
Source : Livre "Le mois de novembre consacré au souvenir des âmes du purgatoire"
27ème jour
La pensée du purgatoire nous prouve la folie de ceux qui ne travaillent pas à l'éviter, en expiant leurs péchés en ce monde.
Quel
est celui qui pourrait sans frémir se voir exposé à la torture, aux
chevalets, aux ongles de fers, aux grils ardents, aux huiles bouillantes
et aux autres supplices inventés par des tyrans persécuteurs, par le génie féroce des peuples barbares, ou par les suggestions infernales des ennemis
de la vérité, et de la vertu ? L'horreur de ces tourments fait trembler
les hommes et les porte à supplier Dieu de les en préserver : c'est la
pensée de saint Augustin. Mais parce que l'apôtre saint Paul annonce que
celui
dont l'ouvrage sera brûlé ne laissera pas d'être sauvé, quoiqu'en passant par le feu, l'on
s'inquiète peu d'y passer, d'y rester même un temps proportionné au peu
de cas qu'on en fait quià dicitur, salvus erit
; contemnitur ille ignis : ô stupide insouciance ! ô aveuglement dont
les suites sont si déplorables ! Car enfin ce feu sera incomparablement
plus insupportable que tout ce qu'on peut souffrir en ce monde.
«
Eh quoi ! s'écrie saint Bonaventure, vous ne sauriez maintenant endurer
patiemment les moindres atteintes de la douleur ; que ferez-vous donc,
quels seront vos regrets, vos lamentations, quand vous vous verrez
livrés à cet effroyable incendie, totalement absorbés dans cet abîme de
douleurs. »
Ces
réflexions toutes simples de saint Augustin et de saint Bonaventure
conviennent encore aujourd'hui à un nombre presqu'innombrable de
Fidèles, vivant, il est vrai, dans la crainte de Dieu, mais dans une crainte trop bornée à quelques égards. Ils ont peur de l'enfer, on le voit ; quant au purgatoire, il ne paraît pas qu'ils en aient la moindre appréhension. Pourvu que je sois sauvé , dit-on, je ne m'inquiète pas du traitement
fait à mon âme au moment de la séparation de son corps. Pesons bien
tous ces termes ; ils méritent attention. Quoi ! vous ne vous inquiétez
pas si Dieu, par un jugement rigoureux, vous exclut de sa vue béatifique
pour de longues années, pour des siècles
peut-être ! Ah ! c'est que vous ne comprenez pas encore ce qu'est un
Dieu, vous n'avez pas la plus petite idée de l'empressement avec lequel
l'âme, dégagée de ses liens terrestres, se portera vers son Créateur,
son centre unique, sa dernière fin, son vrai tout ; vous ne songez pas
qu'un seul instant de la pure jouissance du Souverain-Être,
au séjour de sa gloire, vaut mieux que mille ans dans un paradis
terrestre. Avez-vous jamais éprouvé une seule étincelle de la divine
charité dont la flamme dévore l'âme du juste en l'autre vie où elle est consommée ? qu'auraient pensé les Saints du langage de ces chrétiens si insouciants sur le délai de la vision intuitive d'un Dieu en trois personnes ? Ignorez-vous donc que, comme dans l'enfer la peine du dam est incomparablement plus intolérable que celle du sens, ainsi dans le purgatoire, la
privation de Dieu, quoique passagère, est sans contredit plus cruelle,
plus douloureuse que toutes les autres expiations de ce lieu de
souffrance. La peine d'une âme faite pour posséder Dieu, et qui s'en
voit repoussée, éloignée jusqu'à un terme qu'elle ignore, et qu'il n'est
plus en son pouvoir de rapprocher, ne souffre aucun parallèle, parce
que rien dans la nature ne ressemble au bonheur infini qu'elle voit,
qu'elle touche et qui lui échappe.
Vous ne vous inquiétez pas du traitement
fait à votre âme au moment de la séparation de son corps ! Y
pensez-vous ? Si vous n'avez pas assez de foi pour pressentir l'effet du délai plus ou moins long de la félicité suprême, peut-être serez-vous plus affecté des peines sensibles qu'il faut subir dans ces prisons de la justice divine. En conséquence, je vous le demande : voudriez-vous, pour l'empire de l'univers, souffrir seulement pendant un jour, le feu qui dévore les réprouvés, ce feu allumé par la colère du Dieu des vengeances
contre ses ennemis : ce feu dans lequel sont rassemblés, réunis,
concentrés tous les maux, toutes les espèces de tortures ? Or le feu du purgatoire est le même
ou de même nature que celui de l'enfer : comment ne pas trembler à la
seule pensée d'un si horrible tourment ? Mais admirez la bonté de Dieu ;
il connaît votre insouciance, votre peu d'inquiétude sur le traitement
qui sera fait à votre âme ; il daigne en quelque sorte s'en inquiéter
lui-même pour vous. Il sait combien il vous importe de prévenir les
jugements de sa justice. Ce n'est qu'à regret que sa miséricorde infinie
consent à porter au juste des coups si
terribles. Aussi réfléchissez un instant : sans cesse ici-bas sa
tendresse vous sollicite, vous presse d'épargner à son cœur plus que
paternel la douleur de vous punir ; et vous l'y forcez par votre
indifférence pour son amour, par votre insensibité sur vos propres
intérêts. En vain est-il plus jaloux que vous-même de hâter votre
bonheur ; en vain sa miséricorde vous fournit-elle cent moyens
d'acquitter promptement vos dettes sous son règne si doux, si favorable ;
en vain sa grâce toujours prévenante offre-t-elle à votre discrétion
l'immense trésor des mérites du Rédempteur
; en vain sa sainteté incompatible avec les moindres taches de l'âme
vous engage-t-elle par les avertissements de l'Esprit sanctificateur à
vous purifier de tout ce qui peut ternir l'éclat de votre innocence
baptismale, à faire pénitence de vos péchés ; en vain son
incompréhensible bonté attache-t-elle sa gloire à vous couronner au plus
tôt dans les cieux : cruel envers vous-même, vous vous refusez aux
empressements d'un Dieu, et vous l'obligez, pour ainsi dire, de
comprimer ou de retarder les effusions de son amour. Ah ! la mort vous
apprendra combien dans l'autre vie il en coûte d'avoir si mal répondu
aux avances, aux promesses de l'amour le plus
généreux, d'avoir négligé de satisfaire en ce monde à la justice divine
; satisfaction qui vous est si aisée, si courte ; puisqu'une larme,
qu'une sincère pénitence nous fait verser, peut effacer tous nos péchés,
tandis que la pénitence de l'autre vie est longue et pénible ; en un
mot, elle est celle des damnés. Laquelle des deux préférez-vous embrasser ? Se décider pour la seconde, pour l'horrible pénitence que la justice divine exige dans le purgatoire, n'est-ce pas une véritable folie ?
RÉSOLUTION.
Satisfaites dès-à-présent à la justice divine plutôt que d'attendre à le faire
dans ce douloureux séjour d'expiation. Dites avec saint Augustin : Mon
Dieu, brûlez, coupez, tranchez, purifiez-moi en cette vie, afin que vous
me pardonniez en
l'autre, hic ure, hic seca, modo in œternùm parcas. Payez ici-bas par le moyen si facile des bonnes œuvres les dettes qui vous coûteront tant à acquitter dans le purgatoire.
PRIÈRE
Les cieux mêmes ne sont pas purs en votre présence, ô Dieu de toute sainteté ! rien de souillé ne peut y entrer.
Accordez-moi
donc la grâce, Seigneur, de travailler à purifier mon âme par la
pénitence, la soumission, la résignation dans les peines de la vie, par
la pratique des bonnes œuvres : que j'évite avec le plus grand soin les moindres fautes qui pourraient me retenir dans le séjour des souffrances, afin que le moment de jouir éternellement de la vue de mon Dieu ne soit pas retardé.
Ainsi soit-il.
Indulgence applicable aux morts. — 1° Indulgence de dix ans et dix quarantaines chaque fois que l'on visite le saint Sacrement exposé dans une église, pendant les prières de quarante heures, avec le cœur contrit et la ferme résolution de se confesser, pourvu que l'on y prie pendant quelque temps selon les intentions de l'Église.
2° Indulgence plénière pour ceux qui visiteront de même le saint
Sacrement, exposé pendant les quarante heures, après s'être confessés
et avoir communié, et y prieront selon les intentions de l'Église.
Les mêmes indulgences sont accordées pour la visite du saint Sacrement renfermé dans le tombeau les Jeudi et Vendredi-Saints.
(Brefs du 25 Novembre 1592 et du 10 Mai 1606. — Rescrits du 7 Mars 1815 et du 12 Mai 1817.)
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