Le mois de Marie de l'Immaculée conception 23 décembre

Le mois de Marie de l'Immaculée conception
23 décembre

Le mois de Marie de l'Immaculée conception 23 décembre

Source : Livre "Le mois de Marie de l'Immaculée conception" par A. Gratry

XXIIIe MÉDITATION.

Porte du ciel, priez pour nous !
Le mystère du progrès des âmes n'est pas encore assez connu. Le mystère de la Porte du ciel n'est pas encore assez dévoilé aux regards même des chrétiens, même des chrétiens pieux et savants. Tel est du moins l'avis de deux auteurs, grands l'un et l'autre par le génie ou la sainteté.
Écoutons-les successivement. Le vénérable Grignon de Montfort, parlant des moyens d'arriver au vrai culte de la sainte Vierge, à sa conformité, afin de vivre en Dieu par elle, commence ainsi :
« La pratique que je veux découvrir est un de ces secrets de grâce inconnu du plus grand nombre des chrétiens, même des dévots, pratiqué et goûté d'un bien plus petit nombre encore. »
Et voici comment il parle de cette pratique. D'abord il établit qu'il s'agit de combattre et d'éteindre ces foyers de concupiscence, ce mauvais fond par qui nos meilleures actions sont ordinairement souillées et corrompues. « Même lorsque Dieu met dans le vaisseau de notre âme, gâtée par le péché originel et actuel, les grâces et rosées célestes, ou le vin délicieux de son amour, ses dons sont ordinairement gâtés et souillés par le mauvais levain et le mauvais fond que le péché a laissé chez nous ; nos actions, même les vertus les plus sublimes, s'en ressentent. »
C'est ce dont il faut nous délivrer ; mais comment ? Ces foyers sont notre vie ; ils sont la vie de notre âme, telle que nous la faisons. C'est précisément, continue notre auteur, que le secret de la vie véritable, de la vie à venir, de la vie telle que Dieu veut la donner, c'est la mort à nous-même, cette mort nécessaire et féconde dont parle saint Paul lorsqu'il s'écrie : « Je meurs chaque jour ; » cette mort que demande Jésus-Christ quand il enseigne qu'il faut renoncer à soi-même, haïr sa vie. « Quiconque, dit le Sauveur, tient à la vie la perd, et qui consent à la perdre la trouve » (Luc, XVII, 33). N'est-ce pas visible ? Pour trouver cette vie véritable et parfaite que Dieu cherche à verser au centre de notre âme, en ce centre créé pour le concevoir, en ce centre où le Verbe incarné ne cesse de nous appeler, et d'où nous écartent sans cesse l'orgueil d'Adam et la sensualité d'Eve, double foyer d'orgueil et de concupiscence, il faut évidemment renoncer à cette vie double d'orgueil et de sensualité ; il faut mourir à cette vie habituelle pour trouver la vie inconnue. Mais encore, comment mourir ainsi ? Quel est le secret de cette pratique ? Le voici, selon ce vénérable auteur.


Il faut un point d'appui pour mourir, pour passer d'une vie à une autre ; il faut, en quelque chose, s'appuyer déjà sur la seconde pour pouvoir quitter la première. Eh bien ! voici la source de la vie nouvelle : c'est la sainte Vierge et son Fils enfant au centre de votre âme, en ce centre où vous-même n'êtes pas. Vous, vous êtes et vous vivez dans ces foyers mauvais, à distance de ce point virginal qui est au centre, où Dieu veut être conçu par vous. Rentrez en vous. Venez au centre par le recueillement et le renoncement. Cédez à l'intime attraction de Dieu, par l'intercession de la sainte Mère de Dieu, et cet attrait rapprochera les foyers de votre âme vers le centre, les purifiera en les rapprochant, les rapprochera en les purifiant, et ramènera de jour en jour votre âme à la simplicité, à mesure qu'elle mourra chaque jour, comme saint Paul.


Mais encore, le secret de cette mort, où est-il ? Comment faire pour mourir ainsi ?
« Il consiste, dit notre pieux auteur, à se donner tout entier à la sainte Vierge pour être tout entier à Jésus-Christ par elle ; c'est-à-dire qu'il faut lui donner notre corps avec tous ses sens et ses membres ; notre âme avec toutes ses puissances ; nos biens extérieurs, présents et à venir ; nos biens intérieurs et spirituels, qui sont nos mérites, et nos vertus, et nos bonnes œuvres, passées, présentes et futures, et cela sans aucune réserve, et cela pour l'éternité.


C'est là se consacrer et se sacrifier volontairement à Jésus-Christ par la sainte Vierge, par un acte qui n'est autre chose qu'une parfaite rénovation des vœux du baptême. Or le baptême, dit saint Paul, nous ensevelit dans la mort avec le Christ.
Le renoncement complet est la mort volontaire que Dieu demande et dont Jésus a dit : « Celui qui ne renonce pas à soi-même, et ne porte pas sa croix, ne peut pas être mon disciple ; et ailleurs : Celui qui ne renonce pas à tout ce qu'il possède ne peut pas être mon disciple; et ailleurs : Celui qui, comme un grain de froment mis en terre, ne meurt pas, celui-là demeure seul ; s'il meurt, il porte beaucoup de fruits, il devient un épi. »
Ainsi ce grand secret qui peut nous faire passer à l'autre vie en ce recueillement où l'on conçoit Dieu, c'est le don de soi-même à Jésus-Christ, qui est au milieu de nous, par la Vierge, qui est au centre de notre âme.
Mais les mêmes choses vont nous être expliquées autrement.


Bossuet, parlant de ce secret qui nous fait parvenir à la Porte du ciel, c'est-à-dire à vous, ô Vierge sainte, la nomme une porte qui, tout ouverte quelle est par les Saints depuis les premiers siècles de l'Église, n'est peut-être pas encore assez connue des savants, et il prie Dieu , que, devenant tous aussi petits que des enfants, comme Jésus-Christ l'ordonne, nous puissions entrer une fois par cette porte, afin de pouvoir ensuite la montrer aux autres plus sûrement et plus efficacement. »
Et quelle est cette porte, ou du moins quel est l'acte qui nous y mène, car la Porte du ciel est connue par son nom de tout chrétien ? C'est la sainte Vierge, Mère de Dieu ! Quel est cet acte qui nous mène à elle ? C'est, dit Bossuet, l'acte de véritable simplicité, ou l'acte d'abandon. « Cette vraie simplicité, dit-il, nous fait vivre dans une continuelle mort et dans un parfait détachement. On ne l'obtient que par une parfaite pureté de cœur, et par la vraie mortification et le mépris de soi-même ; et quiconque fuit de souffrir et de s'humilier, et de mourir à soi, n'y aura jamais d'entrée ; et c'est aussi d'où vient qu'il yen a si peu qui s'y avancent, parce que presque personne ne se veut quitter soi-même, faute de quoi on fait des pertes immenses et on se prive de biens incompréhensibles. »

Faute de vouloir se quitter soi-même on reste en effet dans le double foyer de concupiscence, avec l'orgueil d'Adam et les faux désirs d'Eve, et l'on n'arrive jamais au centre, à l'unité, à la simplicité , au point où est la Vierge qui conçoit Dieu.
Ailleurs Bossuet s'écrie:
« faites-moi trouver cet acte, ô mon Dieu, cet acte si étendu, si simple, qui vous livre tout ce que je suis, qui m'unisse à tout ce que vous êtes. O Jésus, je suis à vos pieds ; faites-le-moi trouver cet un nécessaire. Tu l'entends déjà, âme chrétienne ; Jésus te dit dans le cœur que cet acte est l'acte d'abandon, car cet acte livre tout l'homme a Dieu, son âme, son corps, tous » ses sentiments, tous ses désirs, tous ses membres, toutes ses veines avec tout le sang qu'elles renferment. Tout vous est abandonné, ô Jésus ! « faites-en tout ce que vous voudrez. »


Or croit-on que l'ardente prière d'une âme qui se donne à Dieu tout entière par sa pleine volonté, qui s'offre elle-même, et tout ce qu'elle possède, à Dieu par Jésus-Christ, à Jésus-Christ par la Mère de Dieu, croit-on qu'une telle prière restera vaine, qu'une telle offrande ne sera pas reçue ? Et qui donc inspire ce désir, si ce n'est Dieu lui-même ? Et qui donc s'est donné à nous le premier, si ce n'est Dieu fait homme, Dieu porté dans les bras de sa Mère et venant au milieu du monde et au milieu de l'âme, où, depuis tant de jours, d'années, de siècles, il attend le monde et chaque âme ?
Vous avez donc là un secret qui n'était pas assez connu, quoique l'Église ne cesse de l'annoncer, un secret certain pour passer de la terre au ciel et de la vie mauvaise et divisée à la vie simple et sainte. Vous avez le moyen d'ôter l'obstacle, de vaincre la duplicité du cœur, la division des forces humaines et la perversité de ce double foyer d'orgueil et de sensualité qui nous tient écartés de Dieu. Ce grand acte nous remet dans ce sanctuaire où les rayons de la face de Dieu viennent, comme au foyer d'un miroir ardent, allumer les saintes lumières et le feu sacré. pour se répandre sur le monde, du sein de cette âme devenue aussi mère de Dieu.


Qu'est-ce que cet acte, sinon, comme le dit saint Jean, cet amour parfait, cette parfaite charité qui bannit la crainte ?
Tout disparaît devant cet acte, qui renferme par conséquent toute la vertu de la contrition et celle du sacrement de Pénitence, dont elle emporte le vœu.
Tel est le mystère du progrès des âmes.
Pouvons-nous espérer, ô Vierge sainte, Porte du ciel, qu'un plus grand nombre d'âmes entreront dans cette voie du progrès, et pratiqueront ce qu'il faut certainement appeler la loi de la vie ? Peut-être que, si l'esprit la connaissait mieux, la volonté s'y soumettrait mieux. Peut-être que, si l'on connaissait la nature de la mort chrétienne et le fruit du renoncement complet en vous, eu Jésus-Christ ; si l'on savait que la lumière, la joie, la paix, la vie croissante, tous les dons de l'esprit de Dieu en sont les fruits ; si l'on savait que ce renoncement consiste à quitter la misère pour trouver l'infini ; si, pénétrant dans les profondeurs du mystère, on y voyait le nécessaire procédé de la vie, l'unique et merveilleux passage de l'âme à Dieu et de la vie du temps à la vie de l'éternité ; si l'on savait que les derniers mystères de la sagesse et de la science sont enfouis comme des trésors dans cette loi sainte et sa divine pratique ; si l'on savait que cette voie de la terre au ciel est très-courte, comme l'enseignent les Saints ; que le ciel, par ce côté, est bien près de la terre, et qu'il descend secrètement sur terre, dès cette vie, par cette porte que vous êtes, ô Marie, pour tous ceux qui la savent chercher ; peut-être, dis-je, un plus grand nombre d'hommes s'efforceraient de ce côté, et, attirant en eux le ciel, hâteraient la venue du royaume de Dieu, c'est-à-dire l'accomplissement de la volonté de Dieu en la terre comme au ciel.







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